L’EVOLUTION DU DROIT PRIVE
MAROCAIN
L
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es textes les plus importants
qui ont vu le jours concernent l’organisation judiciaire (dahir du 15 juillet
1974 qui fixe l’organisation judiciaire du royaume et dahir du 28 septembre 1994
qui approuvant le code de procédure civile) et visent à améliorer le
fonctionnement de la justice et à simplifier la procédure. En plus de ces
reformes, bien d’autres de portée limitée ont été adoptées (code de statut
personnel 1993, code pénal 1982 et 1994). En effet depuis 1993, un certains
nombre de reformes sont intervenues :
-
Reforme du droit
judiciaire :
Généralisation de la
collégialité au niveau des tribunaux de première instance qui siégent avec 3
magistrats. C’est une collégialité rationalisée car la loi distingue les
affaires mineures de celles complexes : les premières sont confiées à un
juge unique (affaires des mineurs, demandes qui tendent à déclarer
judiciairement une naissance ou un décès, enquête suivie en matière d’accidents
de travail et de maladies professionnelles).
Le dahir du 10 septembre 1993 a modifié et complété
les dispositions du code de procédure civile : les tribunaux peuvent être
divisés en section, selon la nature du litige (civile, pénale, sociale,
immobilière et de statut personnel) et chaque section peut instruire et juger
toute affaire soumise au tribunal. De plus cette loi de 1993 a introduit des
innovations qui tendent à renforcer les garanties judiciaires et à améliorer le
fonctionnement du service judiciaire. (Procédure écrite devant les TPI est la
règle).
-
Reforme du droit des
affaires :
L’environnement du droit est
traversé par des mutations profondes sur le plan économique, politique et
culturel. Le législateur marocain s’est donc engagé dans la voie de réformes
globales et on peut citer pléthore de lois et de codes : dahir du 25
décembre 1992 relative aux obligations comptables des commerçants, dahir du 1
août 1996 formant code de commerce, refonte du droit des sociétés (loi 17-95
relative aux sociétés anonymes). On peut citer aussi loi relative à la
propriété industrielle (dahir du 15 février 2000), loi sur la bourse des
valeurs, loi relative au micro crédit.
I - L’organisation judiciaire
Ce terme désigne l’ensemble des
tribunaux et cours du royaume. Le terme tribunal est réservé à des juridictions
inférieures telles que le tribunal de première instance (TPI).
Par contre le terme cour
s’applique aux juridictions supérieures telles la cour d’appel (CA) et cour
suprême (CS).
Un certain nombre de personne
interviennent dans le fonctionnement de ces juridictions : avocats,
magistrats, greffiers, experts, adouls ; ce personnel fait partie de ce
que l’on appelle le corps judiciaire.
A – Les juridictions :
Au termes de l’article 1 du
dahir du 15 juillet 1974 tel qu’il a été modifié et complété par la loi du 10
septembre 1993, l’organisation judiciaire comprend les juridictions
suivantes :
1 – Juridictions de droit commun :
L’une des innovations
introduites par les textes de 1974 réside dans la généralisation au niveau du
premier degré de juridiction, du système du juge unique. En effet depuis la
réforme de 1993, seules les juridictions communales et d’arrondissement et
exceptionnellement les TPI, sont des juridictions à juge unique. En revanche
les autres juridictions de droit comme (CA et CS) obéissent à la technique de
la collégialité (concours de plusieurs juges).
a – Juridictions à juge
unique :
Juridictions communales et d’arrondissement (JCA)
Dotés d’attributions
qualitativement limitées mais qui couvrent des affaires pénales et civiles
relativement étendues. L’organisation de ces juridictions est composé d’un juge
unique, assisté d’un greffier ou d’un secrétaire. La compétence de ces
juridictions se réduit aux affaires mineures en matière civile (actions
mobilières et personnelles dont la valeur n’excède pas 1000 DH) comme en
matière pénale (infractions passibles uniquement d’une peine d’amande). Les
jugements rendus par les JCA ne sont susceptibles d’aucune voies de recours
ordinaire ou extraordinaire.
Les tribunaux de 1ère instance siégeant à juge
unique :
Siégent exceptionnellement à
juge unique pour connaître d’un certain type de demandes (affaires des mineurs,
demandes tendant à déclarer judiciairement une naissance ou un décès,
procédures de conciliation en matière d’accident de travail et maladies
professionnelles).
b – Juridictions
collégiales :
Tribunaux de 1ère instance :
Siégeant en formation
collégiale qui peuvent connaître de toutes matières sauf quand la loi attribue
formellement compétence à une autre juridiction. Le TPI a une compétence
générale qui s’étend à toutes les affaires pénales, civiles, immobilières,
sociales, statut personnel et successoral.
Cour d’appel :
En toute matière, l’audience
est tenue et les arrêts rendus par trois magistrats. Sa compétence s’étend
aussi bien aux appels des jugements des TPI que des appels des ordonnances.
C’est un deuxième degré de juridiction, c'est-à-dire qu’elle examine une
seconde fois les affaires déjà jugées en première instance.
La chambre criminelle de la
cour suprême juge en premier et dernier ressort les infractions les plus
graves : crimes.
Cour suprême :
Se trouve au sommet de la
hiérarchie ; La cour suprême comprend 6 chambres : civile, statut
personnel et successoral, commerciale, administrative, sociale et pénale. Les
audiences sont tenues et arrêts rendus par cinq magistrats et la présence du
ministère public est obligatoire dans toutes les audiences. Les deux
principales attributions de la CS :
-
Recours en annulation pour
excès de pouvoir formés contre les décisions de certaines autorités
administratives.
-
Pourvois en cassation formés
contre les décisions rendues en dernier ressort par toutes les juridictions du
royaume.
2 – Juridictions spécialisées :
Tribunaux administratifs : Sous contrôle de la CS , se caractérisent par le
système de collégialité et par l’institution d’un ministère public réellement
indépendant par rapport au pouvoir exécutif appelé le commissaire royal de la
loi et du droit. A une compétence générale en matière administrative ou pour
les litiges qui mettent en cause l’administration. (Contentieux électoral ou
fiscal …)
Juridictions de commerce : Dahir du 12 février 1997 a prévu la création des
tribunaux de commerce et des cours d’appel de commerce. Les tribunaux de
commerce sont compétents pour connaître des actions relatives aux contrats commerciaux,
aux effets de commerce, actions entre commerçants à l’occasion de leurs
activités commerciales, différends entre associés d’une société commerciale et
ceux relatifs à raison de fonds de commerce. La procédure est en la matière
écrite et le tribunal ne saurait rendre sa décision sans avoir au préalable,
rédigé intégralement le jugement qu’il va prononcer.
Quant aux cours d’appel de
commerce, elles connaissent des appels interjetés contre les décisions rendues
en premier ressort par les tribunaux de commerce.
Cour des comptes et cour
régionales des comptes : Cour des comptes est une juridiction comptable
supérieure régie par les articles 96 à 99 de la constitution actuelle et qui
assure le contrôle de l’exécution des lois de finances et la régularité des
opérations de recettes et de dépenses des organisations soumis à son contrôle
en vertu de la loi et en apprécier la gestion. Quant aux cours régionales des
comptes, elles assurent le contrôle des comptes et de la gestion des
collectivités locales et de leurs groupements.
Juridictions
d’exceptions :
-
Haute cour de justice (article 88 à 92 de la
constitution de 1996) : juge les membres du gouvernement qui ont commis
des crimes et délits dans l’exercice de leurs fonctions.
-
Tribunaux militaires : qui comprennent
le tribunal militaire permanent des FAR (juge les infractions commises par les
militaires et cadres de l’armée comme la désertion ou le vol, infraction contre
la sûreté extérieure de l’Etat) et tribunaux militaires en temps de guerre.
B – Corps judiciaires :
1 – Les Magistrats :
Le dahir du 11 novembre 1974
prévoit que l’accès au corps de la magistrature se réalise par voie de
concours. Après un stage de deux années, les attachés de justice qui ont subis
avec succès l’examen de fin de stage peuvent être nommés par dahir sur
proposition du conseil supérieur de la magistrature.
-
Magistrat du siège : jugent et
tranchent les procès qui leur sont soumis.
-
Magistrat du ministère
public :
magistrats du parquet qui représentent le pouvoir exécutif.
2 – Les auxiliaires de la justice :
Les auxiliaires directs : ce sont les greffiers
(s’occupent des audiences, des procédures commerciales, des faillites) et
huissiers de justice (procèdent aux notifications nécessaires à l’instruction
des procédures, dresser les actes requis pour l’exécution des ordonnances,
jugements et arrêts, remettre les convocations en justice…)
Les auxiliaires
indirects :
avocats, oukils judiciaires (assistent et représentent comme les avocats les
parties et rédigent tous les actes de la procédure : mais ils
n’interviennent que dans les matières qui relèvent du chraa), défenseurs
agrées, adouls (assurent le service de greffe et de notariat au regard des
différents actes relatifs au statut personnel, familial et successoral et aux
transactions sur les immeubles non immatriculés : reçoivent aussi des
déclarations et témoignages).
II – La procédure proprement dite
A – Généralités sur la procédure
1 – La procédure civile :
Le procès au Maroc est dirigé
par le juge lui-même : on parle de procédure civile de type inquisitoire.
Depuis 1974 avec la généralisation du système du juge unique au niveau du
premier degré de juridiction, son rôle est devenu prépondérant dans le cadre
des juridictions populaires et des TPI. Devant cette juridiction, c’est le juge
qui préside le déroulement de la procédure et mesures nécessaires en vue
d’instruire l’affaire.
2 – La procédure pénale :
L’aspect inquisitoire se
manifeste au niveau des poursuites (action exercée par le magistrat du ministre
public), de l’enquête policière (investigations et enquêtes préliminaires sont
conduites par les membres de la police judiciaire qui recherche les auteurs et
constatent les infractions) et de l’instruction préparatoire (le juge
d’instruction peut procéder à tous les actes d’information qu’il juge utiles à
la manifestation de la vérité).
Au cours de la dernière phase
du procès qu’est le jugement, c’est le système accusatoire qui prévaut (le juge
marocain interroge l’inculpé mais l’adversaire de la personne poursuivie ou ses
avocats peuvent discuter tous les moyens de preuve.
B – Les principales voies de recours :
1 – L’opposition :
Voie de recours dirigée contre
les jugements par défaut, c'est-à-dire contre les décisions rendues contre un
plaideur qui n’a pas comparu et qui n’a pas été en mesure de présenter son
point de vue. C’est une voie de rétraction car on demande au tribunal de
revenir sur son propre jugement.
2 – L’appel :
Voie de réformation introduite
devant une juridiction hiérarchiquement supérieure à celle qui a rendu le jugement
attaqué. L’appel est de droit dans tous les cas qui ne sont pas formellement
excepté par la loi (exceptions concernent les affaires de faible importance).
Le délai d’appel est en règle général, fixé à 30 jours à compter de la
notification du jugement, et 15 devant les tribunaux de commerce. L’appel
produit un effet suspensif (le délai d’appel et l’appel interjeté dans le délai
légal, sont suspensifs) et dévolutif (l’ensemble du dossier de l’affaire est
soumis à la cour d’appel qui est appelée à l’apprécier dans tous ses aspects en
reprenant l’examen des questions de droit et de fait).
3 – Pouvoir en cassation :
Concerne toutes les décisions
rendues en dernier ressort par les juridictions du royaume. Formé par les
parties au procès et le délai pour saisir la cour suprême est de 30 jours à
compter de la notification de la décision.
Les cas d’ouverture sont :
violation de la loi interne (méconnaissance ou fausse interprétation de la
loi) ; excès de pouvoirs, incompétence, violation d’une règle de procédure
ayant causé préjudice à une partie, défaut de base légale ou de motifs (absence
de motivation des décisions rendues). Enfin, les effets du pouvoir : il
n’a pas d’effet suspensif (recours à la cour suprême ne fait pas obstacle à
l’exécution de la décision attaquée), ni d’effet dévolutif (la cour rendra donc
soit un arrêt de rejet du pouvoir ou de cassation).
C – Décisions de justice :
1 – Contenu des jugements et arrêts :
Les décisions de justice
doivent être motivées : La première partie comprend l’exposé des
motifs : motifs de droit (répondre aux questions de droit qui mettent en
cause l’interprétation de la règle de droit) et de fait (relatifs aux
contestations purement matérielles). La seconde partie comprend le dispositif,
c'est-à-dire la solution donnée par le tribunal ou la cour au litige.
2 – Effets des jugements et arrêts :
-
Force
exécutoire :
Le plaideur qui a obtenu gain de cause peut faire appel au concours de la force
publique pour faire exécuter la décision qui a été rendue. La copie du jugement
ou de l’arrêt qu’on lui délivre doit reproduire la formule exécutoire.
-
Autorité de la
chose jugée :
Il est impossible de remettre en cause les points qui ont été tranchés par la
juridiction ; ces solutions sont définitivement acquises et ne peuvent
donner lieu à une nouvelle instance.
Merci beaucoup cher professeur
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