jeudi 17 septembre 2020

Nul n'est censé ignorer la loi- Dissertation gratuite




L’adage est une formule qui résume un principe, une règle de conduite, il s’agit ici d’un principe général du droit. Cet adage signifie que personne n'est supposé ne pas être informé, ne pas être au courant des lois en vigueur mais ne signifie pas que tout citoyen est censé connaitre l’ensemble des textes législatifs (règlements, décrets, jurisprudence….) existant dans l’ordre juridique.
De plus, c’est un critère normatif de la règle de droit. Cette analyse se vérifie dans l’étude des termes :
- La tournure négative montre qu’on ne peut refuser une loi qu’on ne connait pas. Cependant, il est impossible de toutes les connaitre :
- censé peut se rattacher à supposer les citoyens sont considérés comme connaissant la loi, mais se présupposé obligatoire n’est que théorique.
- ignorer signifie d’abord ne pas savoir et être dans l’ignorance, c’est ne pas savoir ce qu’est bon pour soi. Ainsi tout homme qui sort de l’ignorance peut donc apprécier et respecter la loi.
-Pour finir, la loi est une règle écrite de caractère permanant ayant une portée générale et un caractère impératif, cet adage exclu donc toutes les autres sources du droit : décrets, jurisprudence. On voit que le sujet pose des conditions de fond et de forme, cependant comment rendre la loi accessible ? et comment l’homme peut il prendre connaissance de toutes les lois ?
Cet adage fait donc l’objet de difficultés et de critiques, car rare sont les personnes qui prennent connaissance de la loi. Cependant la suppression de cette maxime ne parait pas envisageable car elle masque un caractère nécessaire de la loi.
On peut donc se demander si la connaissance de la loi, malgré sa nécessité, n’est pas devenue aujourd’hui une fiction ?
Nous étudierons d’abord la connaissance de la loi comme une présomption irréfragable puis les exceptions relative au principe de la présomption de connaissance de la loi.

I – Principe de présomption de connaissance de la loi

A – Une présomption irréfragable

L’adjectif irréfragable qualifié certains présomptions de droit lorsque la loi y attache un caractère absolu. L’irréfragabilité rend irrecevable l’offre d’administrer la preuve contraire. Par exemple l’autorité de la chose jugée au pénal sur le juge civil, soit quand à l’existence des faits qui constituent la base commune de la poursuite pénale et de l’action civile. Ce caractère empêche l’adversaire de celui qui se prévaut d’un fait établi par une décision pénale, d’offrir de démontrer que ce fait n’a pas eu lieu.
Lorsque les présomptions ne sont pas irréfragables elles sont dites simples ou relatives, ce qui permet à celui qui y intérêt, d’obtenir du tribunal qu’il puisse apporter la preuve contraire. Exemple, la présomption de bonne foi ou encore, la présomption de véracité qui s’attache à l’aveu ou au serment judiciaires.

B – La nécessité de la connaissance de la loi

En effet, sans elle, l’application de la règle juridique ne serait soumise qu’à la volonté des citoyens, qui ne serait plus égaux devant la loi. Ce serait l’anarchie, elle constitue donc sa légitimité du point de vue du peuple. Vice-versa personne ne peut être soumis à une loi non publiée. Dans ce principe, la population y trouve une sécurité cela réduit les lois arbitraires de même les lois suivent plusieurs contrôle avant leurs publication (contrôle de constitutionnalité de la loi…), ce qui les rend légitimes du point de vue de l’Etat.
Ainsi, personne ne peut échapper à la loi souveraine. On voit donc que la connaissance de la loi est un fondement indispensable à sa réalisation. Elle justifie le double pouvoir des autorités ; celui de la créer pour le pouvoir législatif et de la faire respecter pour le pouvoir exécutif.

II – Les exceptions aux principes de présomption de connaissance de la loi

A – Notion d’erreur de droit

L’erreur de droit est une erreur qui porte sur l’existence ou l’interprétation d’une règle pénale. L’orsqu’un individu commet une infraction en ignorant que c’est réprimé, son erreur de droit annule-t-elle le dol général ? c’est une question délicate. D’une part, compte tenu de la définition du dol général, il faudrait répondre positivement, mais, d’autre part, l’adage nul n’est censé ignorer la loi doit logiquement exclure toute erreur de droit. En plus, le nombre des textes en vigueur et décrets ne cessent de se multiplier. Il est donc impossible de connaitre la loi dans son ensemble.
Dans un cas particulier, un décret-loi du 5 novembre 1870 abrogé en 2004, admettait une exception d’ignorance facultative au bénéfice des auteurs d’une contravention commise pendant les trois jours francs suivant la publication du texte la définissant.

B - Les solutions jurisprudentielles aux principes de présomption de connaissance de la loi  

 Pendant longtemps, la jurisprudence a eu à résoudre ce dilemme. Elle est passée par trois phases. 
La première a duré jusqu'à 1950. Pendant cette période, la Chambre criminelle a systématiquement fait prévaloir l'adage « nul n'est censé ignorer la loi ».
 La deuxième phase va de 1950 à 1964. Pendant cette phase, la Cour de cassation a admis une erreur de droit lorsqu'elle était invincible, c'est-à-dire lorsque, avant d'accomplir l'acte, un individu s'est renseigné auprès d'une autorité administrative qui lui a donné carte blanche. Si une erreur de droit est invincible, elle supprime le dol général et donc l'élément intentionnel. Dans un arrêt de la chambre criminelle, un employeur était poursuivi pour n'avoir pas convoqué un délégué syndical au conseil d'entreprise. L’employeur avait préalablement consulté le ministère du travail. La Cour de cassation ne l'a pas sanctionné au motif qu'il a pu croire en toute bonne foi que la non-convocation était légitime et par conséquent qu'il n'avait « pas eu conscience d'accomplir un acte fautif ». En revanche, durant cette phase, les erreurs de droit non-invincibles étaient toujours écartées. 
La troisième phase débute en 1964. La Cour de cassation revient à sa position initiale : nul n'est censé ignorer la loi. Une erreur de droit, même invincible, n'annule pas le dol général mais le (nouveau) Code pénal français a réglé la question de l'erreur de droit par l'art. 122-3 :
« N'est pas pénalement responsable la personne qui justifie avoir cru, par erreur sur le droit qu'elle n'était pas en mesure d'éviter, pouvoir légitimement accomplir l'acte ».Cela revient à admettre l'erreur de droit invincible.