mercredi 17 mai 2017

Procédure de conclusion des conventions



 On s’en souvient, les déclarations et recommandations n’ont pas de valeur obligatoire en droit, et sont seulement adoptées et proclamées par l’Assemblée générale de l’onu. Par contre, les conventions sont, elles, des textes destinés à avoir une force juridique obligatoire à l’égard des Etats visés dans lesdites conventions. C’est pourquoi, les conventions et les pactes sont adoptés dans une résolution de l’Assemblée générale et, à la différence des déclarations et recommandations, ils sont ouverts à la signature ainsi qu’à la ratification ou à l’adhésion des Etats, futurs membres (ou parties) de ces conventions ou pactes. La conclusion des conventions comporte ainsi plusieurs phases successives qui conduisent à l’expression définitive du consentement des Etats à être liés. Ce sont la négociation, la signature, l’approbation et la ratification, auxquelles on doit ajouter l’adhésion, toutes commandant l’entrée en vigueur des conventions.

La négociation

 La négociation des conventions se fait exactement de la même façon que celle des déclarations; on le sait, l’élaboration des déclarations s’est conventionnalisée. La négociation commence avec des pourparlers de groupes à groupes menés au sein de la Troisième et de la Sixième Commission de l’Assemblée générale, du Groupe de travail ou du Comité spécial, quelquefois également au sein d’une Conférence spéciale ou d’un Congrès mondial convoqué par l’Assemblée générale. Elle se prolonge par la suite au sein de l’Assemblée générale, de la Conférence spéciale ou du Congrès mondial en séance plénière, où le texte est de nos jours de plus en plus discuté et voté article par article, et où de nombreux Etats individuellement ou collectivement procèdent à des explications de votes, donnant ainsi avec précision la teneur de leur position sur la règle examinée. Aussi longtemps que le texte n’est pas arrêté, c’està-dire jusqu’à l’adoption de la convention, toutes ses dispositions peuvent être remises en cause, selon la technique toujours plus systématisée de compromis global (package deal en anglais), en vertu de laquelle l’accord d’un Etat sur un point donné est subordonné à son accord sur tous les autres.
Le texte arrêté de convention est toujours constitué du préambule et du dispositif. Le préambule contient l’énumération des Etats parties ainsi que l’exposé des motifs ou l’objet et le but de la convention. Le dispositif comprend tout d’abord les articles, ensuite les clauses finales c’est-à-dire la procédure d’amendement, de révision , les modalités d’entrée en vigueur, d’extension, la durée de la convention, etc., enfin éventuellement les annexes à la convention qui généralement sont des dispositions techniques ou complémentaires concernant certains articles de la convention ou son ensemble.

 La signature

 La fin de la négociation du texte se décompose en deux opérations: d’abord le vote ou l’adoption par consensus de la convention par l’Assemblée générale, la Conférence spéciale ou le Congrès mondial, ensuite la signature de la convention par les représentants des Etats. La signature a pour portée d’authentifier le texte issu de la négociation, c’est-à-dire de déclarer que le texte arrêté est fidèle à l’intention des Etats. Un texte authentifié n’est en principe pas susceptible de modification.
La signature marque la fin de la négociation, mais ne signifie pas que la convention soit devenue obligatoire pour les Etats qui l’ont signée. En général, le caractère juridique obligatoire de la convention résulte de l’expression du consentement à être lié par elle et non de la signature. Toutefois, dans certains cas, la signature peut constituer, en elle-même, l’expression du consentement de l’Etat à être lié par la convention qui devient alors obligatoire du seul fait qu’il l’ait signée : ceci est le cas dans la procédure de conclusion des conventions en forme simplifiée, qui est une procédure courte dans laquelle la signature remplit la double fonction d’authentification du texte et d’expression de la volonté d’être lié. Dans tous les autres cas, c’est-à-dire de conclusion des conventions en forme solennelle (ou classique, ordinaire, longue), la signature manifeste la volonté de l’Etat de continuer la procédure jusqu’à l’expression définitive de sa volonté d’être lié par la convention.

 L’approbation

L’approbation constitue le premier acte par lequel les autorités de l’Etat expriment le consentement de celui-ci à être lié. Elle permet aux autorités de l’Etat, en l’occurrence, dans les Etats à régime représentatif, les Parlements qui sont associés à la conclusion des conventions, de vérifier si les représentants du gouvernement n’ont pas outrepassé les instructions reçues.
Cette vérification n’est en principe pas une remise en cause de la parole donnée puisque la convention n’est pas encore définitivement obligatoire pour l’Etat; il s’agit uniquement d’un nouvel examen du texte avant d’engager juridiquement l’Etat. Néanmoins, cet examen n’est pas une pure formalité car le Parlement peut être amené à refuser l’approbation de la convention : le droit de refuser de ratifier une convention est donc inhérent à la notion de procédure solennelle, classique, ordinaire ou longue de conclusion des conventions.
L’approbation parlementaire intervient généralement dans l’intervalle de temps entre la signature et la ratification de la convention. Elle n’est donc pas la ratification proprement dite car dans les régimes représentatifs, le Parlement autorise la ratification, et le Chef de l’Etat y procède formellement. Après l’approbation, le Parlement ne peut définitivement plus remettre en question la ratification de la convention ou l’adhésion à celle-ci.

 La ratification

 La ratification est le second acte par lequel les autorités de l’Etat expriment le consentement de ce dernier à être lié : c’est l’acte par lequel l’autorité étatique la plus haute dans la compétence de conclure les convention (dans les régimes représentatifs le Chef de l’Etat), confirme la convention élaborée par ses représentants à la négociation, consent à ce qu’elle devienne définitive et obligatoire et s’engage solennellement au nom de l’Etat à l’exécuter. Avec la ratification de la convention, l’Etat met ainsi un terme à la procédure classique ou ordinaire de conclusion.
Il est utile de relever qu’il n’existe pas de présomption ou d’obligation générale de l’Etat de ratifier une convention qu’il a signée et qui a été approuvée par son Parlement. La compétence de ratifier appartenant au Chef de l’Etat, c’est-à-dire à l’exécutif, celui-ci peut très bien ne pas donner suite à l’autorisation parlementaire et s’abstenir de ratifier pour des raisons d’opportunité politique, comme il peut prendre son temps et ne le faire qu’après un très long délai. Quels que soient les motifs de son abstention, l’Etat qui n’exprime pas son consentement définitif à être lié n’a pas l’obligation de respecter la convention et ne peut pas non plus se prévaloir des dispositions de cette dernière. Seul l’envoi des instruments de ratification est susceptible de lier l’Etat.

 L’adhésion

  L’adhésion est l’acte par lequel un Etat qui n’a pas participé à la négociation et, de ce fait, n’a pas signé le texte de la convention, exprime son consentement définitif à être lié. L’adhésion a la même portée que celle de la signature et de la ratification.

L’entrée en vigueur 

 Pour qu’une convention commence à s’appliquer, il faut d’abord que soient remplies les conditions de son entrée en vigueur. En matière de conventions conclues sous les auspices de l’ONU, il est de tradition que les clauses finales de ces conventions subordonnent l’entrée en vigueur de ces dernières à la réunion, non pas de toutes, mais seulement d’un certain nombre de ratifications. Ainsi, ce nombre est habituellement aujourd’hui de trente-cinq, mais est souvent modulé et abaissé si l’on veut faciliter l’entrée en vigueur, ou augmenté si une large participation est nécessaire pour des raisons d’efficacité. On peut citer ici le cas de la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille, adoptée et ouverte à la signature, à la ratification et à l’adhésion par l’Assemblée générale le 18 décembre 1990. Cette convention n’est entré en vigueur qu’en 2003 après avoir finalement atteint le nombre de vingt instruments de ratification ou d’adhésion requis à cet effet, bien que l’ONU comptait 191 Etats membres alors (192 à ce jour).
La limitation du nombre des ratifications indispensables à l’entrée en vigueur des conventions est assurément une évolution dans la technique de conclusion des conventions, car elle facilite et accélère l’application de ces dernières. Mais l’existence de plus en plus répandue d’un grand nombre de réserves apportées à certaines dispositions des conventions par les Etats qui ratifient ces conventions, affaiblit ces dernières : en effet, s’il est vrai que le jeu des réserves peut conduire à l’universalité des conventions, en permettant l’engagement d’Etats qui, sans cette soupape de sûreté, refuseraient de se lier, cela se fait généralement au prix de la dénaturation des conventions qui perdent toujours leur intégrité.

 Référence :

 Professeur Isse Omanga BOKATOLA.

Texte publié par le Centre international de formation à l’éducation aux droits de l’homme et à la paix (CIFEDHOP)

« Le droit international des droits de l’homme » - Collection thématique – Hors série,

Introduction aux droits de l’homme – Genève, 1997
 
  •  Les Notions de base en matière de droits fondamentaux, CODAP Centre de conseils et d’appui pour les jeunes en matière de droits de l’homme